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9 septembre 2011 5 09 /09 /septembre /2011 14:21

Le 7 juillet 2011 j’ai écrit dans mon cahier :numerisation0298.jpg

J’ai enfin pu aller chez ma tante  pour scanner les archives de la résistance de ma grand-mère.

J’en suis fort émue. D’autant que ma tante c’est mise à ma disposition, recherchant des lettres, des photos pour moi. De plus, elle m’a écouté, parfois surprise de ma passion, de l’avancement de mes recherches.  Je ne prétends pas être une érudit de la question, bien au contraire, car plus on cherche et plus on se pose de questions, mais je m’attache à retracer l’histoire de Stanislas et Madeleine, du coup, même des détails insignifiant me semblent parfois dignent d’intérêt car ils ont fait leur quotidien.

Bref, j’ai trouvé des trésors ! Madeleine conservait précieusement des photographies de Stanislas durant la guerre d’Espagne, et en particulier, des photos qui me semblent être des camps de Saint Cyprien et de Gurs ! des photos inédites !

J’ai envoyé des copies à l’amicale du camp de Gurs pour confirmation, et il semble bien que cette découverte ait un sens pour eux aussi.

Il y a par ailleurs, les manuscrits de Madeleine. Il y en a beaucoup, souvent qui répètent la même histoire de son entrée dans la Résistance en octobre 42, un mois seulement après la mort de Stanislas, avec plus ou moins de précision selon les textes. Parfois ils sont raturés, parfois les mots sont illisibles, j’arrive quelque fois à deviner, d’autres fois non.

Elle raconte son travail d’agent de liaison avec BOCZOV et MICHEL ; puis, RAYMAN et ELEK, et aussi avec MANOUHIAN. 4 d'entre eux furent de l'affiche rouge...

Je suis très excitée de ces trouvailles, car elles permettent de mieux comprendre ce qu’elle ne racontait pas, ou peu. Je connaissais quelques anecdotes, qu’elle nous contait avec amusement, elle ne racontait pas la peur, les enjeux, l’inconscience, le frôlement plus ou moins recherché de la mort.  Elle ne disait pas l’irrationnel désir de retrouver Stanislas, la tristesse sans fond dans laquelle elle plongeait parfois. Alors que ces récits, eux, évoquent pudiquement, ces parcelles d’elle.

Parmi ces manuscrits, Il y a un texte, particulièrement émouvant. C’est une lettre d’amour posthume qu’elle écrit à son mari, 50ans après sa mort. Elle y raconte leur rencontre, cette étincelle de bonheur entre eux, la tendresse, l’amour, resté en suspend malgré les années. Lucide, elle sait que cette beauté, cette pureté, aurait pu s’entacher du quotidien s’ils avaient vécu plus ensemble, mais comme ce bel amour lui fut arraché en plein vol, elle s’est nourrit de ce feu, de ce qui fut et aurait pu être,  pour poursuivre sa route. Elle me fait penser à une Juliette sans son Roméo ou à une Iseult sans son Tristan…ces amours fulgurantes, passionnelles qui vous consument et vous ravissent l’âme.

Pourtant elle a eu une vie après, d’autres amours, mais il semblerait que le seul qui revint hanter son âme  Stanislas et son doux regard gris.

Elle connut la réputation de Stanislas avant même de le rencontrer. Car, et je ne sais toujours pas pourquoi ni comment, elle fréquentait la communauté polonaise belge. On  entendait donc parler d’un certain « Stanis » militant, persuasif et combattant, dévoué camarade.  Il jouissait d’un grand prestige auprès de Julia Pirotte, et de sa sœur Maria elles aussi immigrés polonaises échappés de justesse des jaules polonaises pour activisme communiste. Julia devait être dithyrambique, au point que Madeleine cru qu’il existait des relations plus tendres qu’amicales entre eux. Est-ce Madeleine qui, jalouse, le pensa ou Julia qui entretint cette illusion ? je n’en sais rien.

Comment devint-elle marraine de prisonniers de GURS ? Encore une question sans réponse sinon des suppositions : je pense que c’est grâce à la section du parti communiste que l’on sollicita les jeunes femmes pour soutenir le moral des prisonniers brigadistes. Connaissant Madeleine, sa générosité et son enthousiasme, je ne doute pas qu’elle accueillie cette proposition avec ferveur. Elle fut  donc  marraine d’un autre prisonnier, un polonais je crois, un ami de Stanislas sans doute.  Elle racontait que ce camarade lisait ses lettres à voix haute, afin de partager les nouvelles. Le courrier prenant une importance considérable au camp. C’est alors que Stanislas aurait demandé à son ami la permission d’écrire lui aussi à cette marraine bien sympathique.  Ceci est la version que j’ai toujours entendu raconter, mais dans la lettre posthume qu’elle adresse à mon mari, il semblerait que ce soit elle qui ait pris l’initiative d’écrire à ce prestigieux Stanislas dont elle avait entendu parler… qui saura ? et puis quelle importance ?

Elle dit qu’elle ne cessait de donner des nouvelles de Julia à Stanislas, ce qui l’agaçait beaucoup, il aurait préféré qu’elle lui parlât d’elle, et seulement d’elle. Il avait demandé une photographie…et elle était très belle. S’enthousiasmait-elle autant de tout ce qui pouvait éveiller la conscience et l’âme ? J’ai toujours été admirative de cette jeunesse d’esprit, de cette écoute, de ce désir d’apprendre, de cette altérité chez ma grand-mère. Je ne la vois pas autrement, même plus jeune. Peut- être plus naïve, plus impétueuse. Est- il tombé amoureux dans cet échange épistolaire ou en la rencontrant à Paris,  fin 39 ? Ce que Madeleine disait, c’est que les lettres devenaient de plus en plus tendre, de plus en plus intimes, et quand enfin ils purent se voir, dans un café, en compagnie de Maria DJAMENT (la sœur de Julia) et un autre camarade, les yeux qu’il posait sur elle, étaient plein de tendresse. Il chercha à la revoir, vint plusieurs fois manger chez elle le peu qu’elle avait avant d’aller à la cantine ouvrière. il avait toujours très faim. Et puis un jour, il n’est pas reparti…

Dans d’autres manuscrit, elle décrit des actions de Résistance, des frayeurs qu’elle a eu, des tracas, elle parle avec tendresse de ses « petits frères » Marcel Rayman et Tomas Elek, de 18 et 20 ans. Elle parle de la gentillesse de Manouchian, la réconfortant quand elle était triste, lui promettant des jours meilleurs, dans un après-guerre proche et rayonnant.  Elle raconte le manque, de son mari, de son enfant qu’elle dut placer loin d’elle et des dangers.

C’est à la fois terriblement émouvant et une mine d’informations.

J’ai passé une bonne partie des vacances à retranscrire ces manuscrits afin de pouvoir les exploiter, mais aussi les partager.  Ainsi, j’ai pu reprendre mon écriture, et ouvrir d’autres pistes de recherches. Me reste à travailler tout ça.

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