demain, 6 juin 2009, j'irai à la commémoration du Mont Valérien, de 14h à 18H . mais en attendant de lire mes impressions du jour j'avais envie de publier ce que
j'avais écris à la suite d'une autre visite...
21 septembre 2008
visite du mémorial du Mont Valérien
je suis, émue , plus qu’émue, en communion avec eux. Eux les fusillés, lui surtout, cet homme qui fut le mari éphémère de mamie.
Mon mari et deux de mes enfants m’accompagne. Il fait un temps magnifique, même si le fond de l’air reste frais. A peine une heure de route et nous sommes à pied d’œuvre. J’avais oublié qu’aujourd’hui justement , c’était la journée du patrimoine, et qu’ainsi, la visite du fort étaient cadrée. Tans mieux, me dis-je, il y aura diversion à mes émotions. Je ne sais pourquoi, mais quand il s’agit de cette histoire là, celle de mon grand père, j’ai du mal à montrer mes larmes. La visite commence par une fouille de nos sacs et un dépôt d’une carte d’identité à l’entrée. Nous allons pénétrer dans une enceinte militaire, il faut montrer patte blanche !
Puis on nous invite à aller visiter la poudrière, un vaste bâtiment de pierre, semi enterrer, dans lequel est retracée l’histoire du fort, et les personnages qui y sont passés, comme cet abbé Franz Stock, figure du fort durant justement la période qui m’intéresse. Je ne peux m’empêcher de penser : « as t il croisé la route de Stanislas ? » et « Stanislas lui as t il parler », « donné un mot pour Mamie ??? ».
Mais cela amène d’autres questionnement : Stanislas était il croyant ? je n’en sais rien. A t il reçut une éducation religieuse ??? je ne sais pas. Et je ne saurais jamais sans doute. Il était communiste, mais ça ne veux rien dire quant à la foi. L’anticléricalisme de l’époque n’est peut être que franco français ? au fond, quelle importance, cet abbé avait l’aire bon, et ne distinguait pas les hommes en fonction de leurs croyances, il acceptait toutes les confidences, en tout cas, c’est ce qui est écrit sur ces panneaux, attaqué par l’humidité.
En sortant nous poursuivons la visite en entrant dans le premier mémorial, casemate transformée en crypte, dans laquelle sont disposés en quinconce des bancs de pierre blancs. Le silence est hommage. Je leur dit merci. Même si aucun cercueil n’est plus là. Ma pensée s’unie avec mes martyrs.
Sur le mur extérieur sont gravés ces mots « nous sommes ici pour témoigner devant l’histoire que de 1939 à 1945 ses fils ont lutté pour que la France vive libre ». je suis seule , mon mari et les enfants ont avancés et m’attendent un peu plus haut. En les rejoignant j’essuie rapidement les perles salées dont mes yeux débordent.
Nous montons un chemin ensoleillé, avec une vue magnifique sur une boucle de la seine, est ce Puteaux en bas ? Puteaux où vivait mamie et Nadia à cette époque. Il est mort si près d’elles ! le chemin nous amène à une part étonnante de l’armée, la colombophilie. Bien que n’ignorant pas les histoires de pigeons voyageurs, je ne m’étais pas représenté l'importance stratégique , à une certaine époque, de ces foutus pigeons ! certain furent même cité pour leur bravoure ! ça fait sourire à l’heure du téléphone cellulaire d’Internet et des satellites….mais avant , comment faisions nous ??? ben, avec des pigeons ! l’expo, même si elle est surprenante, ne me passionne pas totalement, je ne suis venue ici que dans un seul but, voir, toucher la cloche commémorative, voir aussi la clairière des fusillés, mettre mes pas dans ceux des fusillé, m’imprégner de ce qu’ils ont vu pour la dernière fois de leur existence. Alors on ne s’attarde pas, et on continue à travers le bois . nous arrivons vers un tunnel, à la croisée de chemins, d’un coté un sentier redescent, vers une autre crypte, la définitive, où 16 cercueils ont été déposés, chaque corps symbolisant un aspect du conflit : les combats de 40, la résistance, les déportations, les batailles. Et, en contrebas, une esplanade avec la croix de Lorraine.
La encore je suis saisie , mon âme communie. mais un grain de sable vient perturber cette communion, car on ne rend hommage en ce lieu qu’aux résistants d’un certain bord. Ceux réunis derrière de Gaule. Il aura fallu attendre 50 ans avant que l’on rende une place aux fusillés du Mont valérien, et encore 4 ans avant l’inauguration de la cloche. C’est ce que j’explique à mes enfants. Combien de témoins sont morts entre temps ? pourquoi avoir attendu tout ce temps ? est ce parce que beaucoup n’étaient pas français ? est ce parce que beaucoup étaient communistes ? s’ensuit un débat avec mon fils sur le fait que la France doit sa libération à de nombreux étrangers, qu’ils soient des pays de l’est,(ouvriers résistants comme mon grand père) comme du Maghreb ou d’Afrique (les tirailleurs ), pour les pauvres soldats, et d’Amérique (ceux là on a moins de mal étrangement à leur rendre hommage) , nous devons beaucoup à ces gens là, mais nous sommes si ingrat avec certain ! pendant que nous discutons de ces injustices nous avons emprunté un escalier de béton qui monte à travers bois vers le haut de la clairière des fusillés. Le silence nous atteint au moment où nous y pénétrons.
En contrebas, une stèle et un drapeau tricolore, en effet il s’agit d’une clairière creusée visiblement dans la colline, un mur de pierre sellées soutient d’un coté la colline excavée, des autres cotés la forêt à repris ses droits. Une ombre paisible envahis le lieu, et le vent dans les branches amène sur le lieu un son de sérénité trompeuse. Je ne peux m’empêcher de me demander « quel temps faisait il ce 21 septembre là ? » et je ne sais pas non plus à quelle heure ils furent fusillés. Ils étaient 46 ce jours là. Seulement 6 poteaux d’exécutions. Cela à du durer des heures ! chacun son tour , entendre les camarades tomber, je n’ose imaginer l’angoissante attente. D’ailleurs où attendaient ils ? dans la chapelle ? que de questions !
Je ne connais pas de prière, mais je communie avec ces hommes courageux. Ici ont été fusillés en plus de Saciek , les
compagnons d’arme de Mamie, ceux de l’affiche rouge en 44. et quelques soit leur attitude devant la mort, les pensées vers leurs femme leurs enfants, leur mère, leur père, tout cela m’atteint ,
je le ressens en moi comme la caresse d’un fantôme planant sur le lieu. Je crois que chaque visiteur ressent cela, car ici tout le monde chuchote.
Seuls les oiseaux se permettent des sons joyeux. Et le vent fait frissonner les feuilles encore vertes . les paroles du chants des partisans est apposé sur une stèle, je ne peux entendre ni
fredonner cette chanson sans sanglots, elle dit trop d’absences et de sacrifices, trop de douleurs. Mais le couplet qui dit « Ami, si tu tombes un ami sort de l'ombre à ta place. » me parle au plus profond de moi car je sais qu’on est venu chercher
Mamie un mois tout juste après la mort de Stanislas pour prendre part au combat.
Nous avançons sur un chemin vers la chapelle, sous un immense mur de meulière haut d'au moins 10 mètres ! il cache une sorte de petit château. La chapelle abandonnée est minuscule à l’intérieur nulle croix, mais au sol, les poteaux déchiquetés, et les cercueils de bois ouvert, qui servaient à transporter les corps des fusillés pour les fosses communes des environs. Les murs ont été restaurés avec un crépis blanc, mais étrangement on a laissé des cadres de bois sur une peinture bleue , ce bleu mat, oriental, dont on drape la vierge. C’est en sortant que je saisie l’explication : la chapelle était couverte des graffitis des condamnés qui , au crayon de bois ou à la pointe de l'ongle ont écrit "vive la France", ou "je t'aime ma chérie" , ou encore "je meurt sans peur"... comme un dernier cri, un sursaut de dignité, un défis à la peur ! Ces mots ont été photographiés, mais la qualité est médiocre, je suis frustrée de ne pouvoir aller y coller mon nez , chercher une trace, un mot de Stanislas ! mais nous somme retenus par une barrière de bois, j’en comprend la nécessité, l’importance de protéger ces vestiges émouvants, car sur le bleu du mur s’accumule en strates du désespoir 4 années de dernières heures griffonnées. J’en frissonne.
En face de la bâtisse, coincé entre un talus et un autre bâtiment la cloche commémorative. Elle est très grosse, en bronze, on y a gravé les 1008 noms des fusillés de 1941 à 1944, et ajouté « à tous ceux qui n’ont pu être identifié » . nous cherchons « son » nom : Stanislas OBODA, et nous le trouvons. Il est à l’arrière, en bas de la cloche, après la date du 21 septembre 42, les noms sont classés par ordre alphabétique. Instant d’émotion, je ne peux me retenir de caresser la cloche et le gardien nous sermonne « il est interdit de toucher ! » sur le mur à coté, sont affichés quelques lettres de fusillés, celle de Manouchian à Mérimée, que je connais déjà et deux autres tout aussi émouvantes. Il y a aussi un fac-similé de l’affiche rouge. Je montre à ma fille les deux principaux compagnons de combat de mamie : Rajman et Elek. Avec eux deux, elle était leur agent de liaison, amenant sur le lieu de l’attentat armes et munitions et les récupérant après. Mais ma voix se casse, je ne vais pas plus loin dans la narration des exploit de Mamie…je ne peux pas parler d’elle en ce lieu sans ressentir la douleur de l’absence. Alors je me tais.
Nous remontrons à pas lent jusqu’aux bâtiments principaux , une expo d’insignes ou de choses militaires sont visibles, mais je n’ai plus d’intérêts pour cela, je n’en ai d’ailleurs jamais eu, je suis une indécrottable antimilitariste. L’armée, les armes, la mort, rien de cela ne me parle. Je voudrais œuvrer pour la paix, l’amitié, la fraternité…je sais cela fait un peu…beatnik, peace and love … ben oui ! je suis une baba cool , éprise d’humanisme, et de bonnes intentions…ça ne m’empêche pas de poursuivre mes recherches historique sur mon grand père !
Nous rentrerons à la maison, peu après, et je sentirai la fatigue soudain peser sur mes yeux, comme un besoin de me replier sur mes émotions, de les digérer lentement.