j'ai continué mes recherches, et j'ai trouvé cette photo prise par Dorothea Lange, devenue célèbre parce qu'elle représente toute la misère incarnée que subissèrent nombres d'américains avec la crise des années 30 aux USA.
cette femme m'émeut beaucoup, elle m'évoque mon arrière-grand-mère Ewa, la femme de Kazimierz, la maman de Stanislas et Tadeuz. je ne peux m'empêcher de voir dans ce beau visage, les traits du désespoir d'une femme, livrée à elle même, seule avec ses enfants, à la merci de toutes les misères du monde, et elles sont nombreuses tant en Pologne en ce début de siècle (je parle du XXe) qu'en Amérique. ici il s'agit de la crise des années 30, la grand crise qui suivi le crack boursier de la fin 29. s'en suivit une crise américaine puis mondiale, provoquant des hordes de chômeurs, tant dans les villes que dans les campagnes. Les photos de Dorothea Lange, illustrèrent parfaitement le célèbre roman "les raisins de la colère" de John Steinbeck.
il y a d'abord la jeunesse de cette femme qui me renvoie à celle d'Ewa, si Kazimierz à 22 ans quand il part en Amérique, en 1909, quel âge a Ewa? peut être la vingtaine, comme lui.
puis il y a sa beauté, ici cette femme a des traits amérindiens, Ewa je l'imagine très belle aussi,châtain clair ou blonde, les yeux bleus, d'un bleu lumineux et clair, un visage slave assurément, aux pommette hautes, aux lèvres finement dessinées, et un beau sourire, franc, chaleureux ( je prend modèle sur ma mère qui ressemblait beaucoup à son père, alors que lui ne ressemblait pas au sien, je suppose donc qu'il avait les traits de sa mère?... et ma mère était belle! ).
elle à l'air d'une paysanne pauvre américaine, ainsi qu'Ewa en Pologne.
elle a de beaux enfants auprès d'elle, quatre, sur d'autres clichés ils sont quatre. Ewa n'aura le temps d'en avoir que deux, il y a ce bébé d'un an, Stanislas, que Kazimierz laisse derrière lui, et l'autre qui naîtra deux mois après, Tadeuz.
ici, un bébé au sein, et deux petits apeurés devant l'étrangère qui les prend en photo et qui se protègent derrière le seul rempart sécure qui reste, leur maman. Elle a ce regard farouche des mères qui se battront jusqu'au bout pour leurs petits, qu'elles protégeront jusqu'à la mort s'il le faut. Ainsi, c'est ce que fit Ewa, qui teint bon jusqu'en 1918, face à toutes les adversités du monde, la misère, la guerre, la faim, la maladie. De quoi est elle morte? de tout ça, certainement. il y eu aussi la grippe espagnole en 18, qui dévasta l'Europe, et les plus fragiles périrent par milliers. est elle passé par Brwinow?
Iici, on lit la solitude, l'absence dans ce regard inquiet. On dirait qu'elle attend quelqu'un, qu'elle s'inquiète . Encore une misère identique qu'Ewa dû supporter: l'absence de son mari, cette attente interminable, cette distance si grande entre eux, les incertitudes, les dangers que l'on s'imagine démultipliés, dès lors qu'on ne connaît pas cet inconnu là bas, si loin. Et il n'y a pas, à cette époque, de moyens d'en savoir davantage, le courrier mets des semaines à être acheminé, et puis, encore faut il savoir lire et écrire! le téléphone n'existe pas encore, on ne sait peut être même pas qu'il puisse y avoir un moyen de communiquer de la sorte à cette époque, dans ces endroits là! alors il faut attendre, espérer, rêver, s'imaginer, penser que tout ira mieux un jour, que la vie reprendra sous d'autres cieux plus cléments.
autant je sais que Kazimierz savait lire et écrire autant je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'intuition que Ewa ne savait peut être pas écrire. c'était courant à l'époque en Pologne, le clergé se contentant d'apprendre aux enfants à signer de leur nom, et quelques rudiments de lectures et de calculs. Suis-je injuste vis à vis d'elle? je ne sais pas. dans mes recherches sur la Pologne de ses années là, j'ai lu la misère du peuple, balloté entre des envahisseurs et des gouvernements peu soucieux d'eux, mais uniquement de leur puissance et de leurs empires: Napoléon, puis le tsar, les prussiens et les autrichiens, qui se partageaient le gâteau Polonais sans vergogne, tandis que le peuple subissait les guerres qu'ils se livrèrent, avec ses conscriptions, et ses razzias! comment penser à aller à l'école si l'on a plus de chez soi?
car ce que l'on apprend entre les lignes de la lecture du Manifeste of Ellisisland, c'est que les lieux de naissances et de résidences des membres de cette famille ne cesse de bouger! Plock, Brwinow, Bloniè, Smilcin (orthographe incertaine) et Craskanow (idem). ça fait beaucoup d'adresses pour des petites gens!
je me pose toujours la question si les Oboda de cette époque furent de fervent catholiques comme la plupart de leurs compatriotes, où déjà des rebelles, bientôt communistes? car j'ai appris avec une légère surprise, que Kazimierz était abonné à un journal polonais :"glos Ludowy" (la voix du peuple) qui fut le journal du parti communiste en langue polonaise! un journal diffusé pas seulement en Amérique mais dans le monde; puisque c'est par lui que Stanislas passa un avis de recherche depuis Gurs, pour retrouver son père en Amérique.
voilà,
dans mon roman, je choisi, je tranche, je m'arrange avec mes envies, mes désirs, je ne me pose plus de question.
Mais dans mes recherches, je me trouve face à une cascade d'interrogations supplémentaires, comme des poupées russes, il y a sous chaque réponse une nouvelle question qui se pose, voire plusieurs.
par exemple: kazimierz va à Detroit. quel métier exerce-t-il? où ça à Detroit, dans quel quartier? où travaille-t-il? combien gagne-t-il?...c'est sans fin, car je ne sais presque rien.
alors... j'invente. je le vois charpentier (ce qu'il fut, à un moment donné de sa vie) à l'époque on a besoin de charpentiers pour construire des maison , c'est un fait, mais aussi pour les voitures qui sont encore avec des châssis de bois. alors? fut il ouvrier chez Ford ou chez Cadillac? ou ne travailla-t-il pas pour l'industrie automobile? ben...je ne sais pas. donc je choisi Cadillac. je le fais habiter dans un quartier polonais (pas difficile là) oui ok, mais il est ou le quartier polonais de Detroit? aujourd'hui, on trouve encore des commerce polonais à Detroit, je suppose donc que c'est le même quartier. j'ai quelques adresses sur des enveloppes à Detroit, plus ou moins proches les unes des autres, à 5 km près...je suppose que ces quartiers furent polonais...
la roue des questions continue...
so today that's all folks!